Fritz Panzer & Michelangelo Penso, Paris, galerie Alberta Pane, jusqu'au 04/04/15
L’oeuvre séductrice de l’artiste italien Michelangelo Penso envahit la galerie Alberta Pane. Inspirées par la nature et la biologie, elles se nomment « exosquelettes ».
Conversation entre Michelangelo Penso et Alberta Pane
A.P.: Quel genre d’œuvres comptes-tu présenter pour ta prochaine exposition à Paris?
M.P.: Je suis en train de préparer des œuvres qui puissent dialoguer avec celles de Fritz Panzer afin que l’espace soit partagé conceptuellement. Je pense que nos œuvres pourront très bien aller ensemble car nous travaillons tous les deux sur la dimension du volume et du vide en ne définissant les espaces tridimensionnels seulement qu’à partir des lignes et non pas avec des plans qui les délimitent : il y a une assonance avec ce type de recherche. Mes œuvres sont toujours inspirées de la science et de la biologie, elles représentent des exosquelettes de bactéries microscopiques. Nous avons tous un squelette, alors que dans la dimension microscopique la plupart de ces êtres ont un squelette externe, comme le cartilage. Mes recherches s’inspirent de cet aspect et sont réalisées à partir de caoutchouc, et sont donc très déformables, même une fois terminées. Dans la nature, ces exosquelettes peuvent effectivement se déformer dans leur milieu naturel, en bougeant, et en flottant dans les vides.
A.P.: Pourquoi est-ce que ton travail est souvent lié à la science et aux images de bactéries, de virus, de micro-organismes etc…? D’où vient cet intérêt particulier?
M.P.: Quand j’ai commencé à m’intéresser à la recherche scientifique, j’ai trouvé beaucoup de nouvelles formes très intéressantes, différents stimuli, mais ce que je préfère le plus est certainement l’idée qu’à partir de la découverte scientifique d’une minuscule particule peut naître une grande révolution sociale et politique dans le monde entier. Il y a plusieurs années, j’ai mené et je mène toujours, des recherches sur les circuits génétiques parce que je crois vraiment que si nous parvenons à maitriser ces petits êtres présents dans notre organisme notre espérance de vie pourra être considérablement rallongée, et que nous pourrons être en mesure de trouver des traitements médicaux à des maladies encore incurables. Une petite invention comme celle ci, pourrait vraiment bouleverser ce que les politiciens et bureaucrates tentent de construire. Je vois donc un énorme potentiel, quasi explosif, dans cette recherche. J’aimerais apporter une dimension esthétique à cette idée, qui pourrait provoquer un grand changement dans la vie quotidienne de chaque individu et dans nos relations sociales.
L’art ne devrait pas manquer cette opportunité de faire partie d’une telle dimension qui appartient déjà à l’abstraction de la pensée. Même mes œuvres, au delà du concept que je veux exprimer, pourraient déjà être placées dans une dimension abstraite vu que je m’éloigne de la représentation du réel : peut-être est ce la différence avec Fritz. J’essaie de représenter l’invisible pour me rapprocher d’une pensée abstraite.
A.P.: La bactérie qui a inspirée tes nouvelles œuvres n’est pas la représentation exacte de la réalité, tu ne les as pas conçue comme une bactérie géante.
M.P.: En effet, je pourrais créer des représentations complètement identiques, mais je pense que ce serait limité car cela serait exactement la même chose que d’aller dans un laboratoire et d’observer avec un microscope. Mes œuvres sont un point de départ pour pousser les personnes à se questionner et finalement trouver le lien avec la recherche scientifique, rechercher une dimension abstraite dans un sens. La pensée d’un chercheur est toujours abstraite, les mathématiques sont elles mêmes pure abstraction, et par conséquent, toutes les lignes définissant les formes dans mes œuvres peuvent être potentiellement des calculs mathématiques de courbes et de paraboles. Ce sont des questions que j’aborde depuis des années.
A.P.: Pourrais-tu nous dire quelques mots sur les différents matériaux que tu utilises pour tes sculptures?
M.P.: Ils sont directement liés à mon environnement direct, et ont toujours rapport avec l’industrie. J’opte pour des matières premières industrielles parce que je peux facilement les trouver à côté de mon atelier (dans le port de Marghera, ville industrielle proche de Venise).
A.P.: Qu’attends-tu de cette prochaine exposition à Paris?
M.P.: Je pense que c’est une nouvelle étape de travail et d’exposition qui symbolise l’entente que nous avons toujours eu, depuis des années maintenant que nous travaillons ensemble. Je trouve aussi que nous avons toujours su renouveler et proposer des choses intéressantes. J’espère que nous parviendrons à faire de même cette fois ci.
Galerie Alberta Pane, 64 rue Notre-Dame de Nazareth, 75003 Paris. Tél. 01 43 06 58 72.