Tourcoing, Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains, Le Laboratoire de la Nature. Du 02 février au 21 avril.

Home / Tourcoing, Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains, Le Laboratoire de la Nature. Du 02 février au 21 avril.

Tourcoing, Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains, Le Laboratoire de la Nature. Du 02 février au 21 avril.

Le laboratoire de la nature traite de la représentation de la nature et plus particulièrement du rapport que l’homme occidental entretient avec la nature, à partir de la construction des discours scientifiques, révélant le goût de l’homme pour la classification et la collection. Cette exposition évoque, en parallèle, la modernité des inventeurs de la photographie à une époque où les réflexions scientifiques bouleversèrent le regard de l’homme sur la nature, sujet contemporain par excellence. Ces images anciennes sont souvent ressenties comme des métaphores de la condition humaine. Les inventeurs de la photographie ont ouvert les champs artistiques au-delà de la représentation des sujets classiques de la nature.
C’est le rôle d’une institution telle que Le Fresnoy de construire des passerelles entre les langages numériques et les procédés anciens, et de porter un regard sur des procédures techniques qui sont également des processus mentaux.
Cette exposition constituée d’installations, de photographies, de films, présente des oeuvres utilisant les technologies les plus contemporaines pour revenir à la naissance du médium photographique.
L’origine de cette exposition est un hommage contemporain à William Henry Fox Talbot. Connu pour être l’inventeur d’un procédé photographique qui porte son nom, W. H. F. Talbot, né en 1800 en Angleterre, est un homme de sciences : membre de la Royal Astronomical Society, mathématicien, philologue, poète et botaniste. Talbot travaille notamment sur des questions touchant à la lumière et à l’optique, il revendique une démarche scientifique moderne fondée sur l’expérimentation et remet en scène les étapes de sa propre démarche scientifique.
Une des questions importantes soulevées par les premiers essais photographiques de Talbot, à savoir les dessins photogéniques, concerne précisément le rapport à la nature. Ces oeuvres peuvent être comprises comme une application des théories romantiques, ce qui était auparavant reproduit par la main de l’homme est désormais entièrement révélé par l’élément lui-même : la photographie permet de voir les détails, les nervures, le limbe, etc. La photographie révèle en quelque sorte, le langage de la nature. Ce qui est encore plus net dans le cas du calotype.
Tout se passe comme si le daguerréotype était le miroir de la nature et que le calotype était amené à devenir le crayon de la nature, devenu le titre du premier ouvrage au monde illustré par la photographie publié par Talbot lui-même. Vers 1839, nous assistons alors à la production de nouvelles images qui, par la nature de leurs supports et par leurs finalités, ont mis en mouvement le procédé historique de la modernité.

Une première oeuvre de l’exposition, intitulée Thresholds (2015) (Le commencement) de l’artiste anglais Mat Collishaw s’inspire directement de la toute première exposition, en 1839 à la King Edward‘s school à Birmingham, des oeuvres de W. H. F. Talbot. L’artiste nous ouvre les portes du passé. Mat Collishaw a reconstitué méticuleusement l’exposition de 1839 en réalité virtuelle 92 Photogenic drawings, des ouvrages tels que Illustrations of manufactures, Inventions and models, des objets inventés par Talbot lui-même tels que Philosophical instruments qui redeviennent virtuellement accessibles. Le visiteur est invité à se promener librement dans une pièce reconstituée physiquement.

Hicham Berrada conjugue intuition et connaissance dans l’art de l’imaginaire et des méthodes des sciences, en particulier de la biologie, de la chimie et de la botanique. L’artiste met en scène une nature primordiale dans ses films et ses installations, il convoque des puissances de vie. L’oeuvre intitulée Mesk-ellil (2015), en français Le musc de la nuit, est une sorte de jasmin qui ne fleurit que de la tombée du jour à l’aube. En intégrant dans son installation ses arbres de jasmin, Hicham Berrada s’invente en maître alchimiste développant un univers dans lequel il joue de la modification des paramètres de l’environnement naturel.

Lisa Oppenheim aborde l’histoire de la photographie depuis les innovations de William Henry Fox Talbot jusqu’aux médias du XXIe siècle. Cette artiste américaine, dont la pratique se positionne dans le courant de la photographie conceptuelle des artistes de la Pictures Generation et du cinéma structuraliste, explore les interactions entre une image, sa source et le contexte dans lequel elle se trouve. Elle active l’imagerie et les techniques historiques et contemporaines de la photographie pour prendre en compte les changements de la technologie et leurs conséquences dans l’interaction d’une image et son regardeur.

Mark Dion explore les croisements entre art et sciences, visions et production de connaissance, collection et modes de présentation. En prenant la place d’un scientifique amateur, d’un historien ou d’un biologiste, Mark Dion porte un regard souvent critique sur les relations entre culture et nature. Des objets récupérés dans divers lieux ; l’artiste crée des mises en scène où le pragmatisme scientifique côtoie une mise en espace aux codes esthétiques contemporains.

Anna-Katharina Scheidegger montre des phénomènes urbains, les signes architecturaux, le lien entre l’architecture, pouvoir et société, passé et futur. Autour de ce thème, elle travaille en photographie, en film et en vidéo, en affirmant la primauté du documentaire – qu’elle est toujours en train de redéfinir et de préciser. Au fur et à mesure son travail l’a amené progressivement vers des sujets pesants, difficiles. Elle travaille de plus en plus souvent sur des gens à la marge de la société, attiré par ces extrêmes, obsédé de s’approcher au bord de l’envergure des modèles de vie possibles.

Hideyuki Ishibashi est un poète de l’ombre. Que se passe-t-il subitement si les ombres prennent le pas sur la lumière ? Par ailleurs, cet artiste inventeur revisite les techniques de la pré-photographie pour aller vers l’invention photographique. En concevant au Fresnoy cette installation photographique intitulée Macula, il nous invite à revivre l’acte photographique.

Anaïs Boudot est en concordance avec la démarche artistique de Hideyuki Ishibashi ; elle poursuit également un travail autour des processus d’apparition de l’image et de l’exploration des techniques photographiques. Par des allers et retours constants entre argentique et numérique, accusant ou amenuisant la frontière qui les distingue, elle cherche à interroger les moyens qui font la spécificité de ce medium. En photographie, elle crée des images hybrides, énigmatiques et hypnotiques, hors du temps et au plus proche du ressentir. « Ce qu’elle convie à chaque instant est avant tout l’expérience du regard qui doute, relance à ses franges, se prend les pieds dans le tapis de l’invisible, cet insaisissable à quoi il faut, malgré tout, donner une forme, et donc une sorte de vérité. »
[Extrait] Léa Bismuth, Anaïs Boudot en son château intérieur, février 2017

Patrick Van Caeckenbergh porte un regard singulier sur l’existence à travers ses oeuvres :
rigoureusement construites, sensibles, poétiques et souvent surréalistes, elles questionnent autant qu’elles dérident ou dérangent. Dada dans l’âme, l’artiste s’amuse et endosse tour à tour les rôles d’anthropologue, généalogiste, biologiste et naturaliste pour mieux approcher l’intime et l’universel. S’il a longtemps travaillé sur le corps, le nomadisme ou le tri encyclopédique, le génie flamand se plaît à reprendre ses réflexions pour en provoquer de nouvelles : présentant un terrier transformé en gîte pour la pensée, une maison en pain d’épices, un ciel suspendu ou un abri précaire dans lequel il s’installa réellement des années durant, Patrick Van Caeckenbergh nous offre alors, le temps de sa mise à nu, une véritable invitation à la rêverie et un grand bol d’air frais.

Cette exposition est conçue en partenariat avec le musée d’Histoire naturelle de Lille.

Le Fresnoy - Studio national des arts contemporains 22 rue du Fresnoy - BP 80179 59202 Tourcoing cedex - France