« Un jour, dans les années 1990, tandis qu’elle était au téléphone, elle a soudain dû noter très vite quelque chose. Près d’elle, rien que sa toile en cours, et, dans sa main, un tube de peinture. Et voici qu’elle se met à écrire directement sur la toile ! Et ça a été une révélation. Elle a découvert une nouvelle manière de s’exprimer, qu’elle a vite baptisé “painting out loud” (« peinture à voix haute »). Alors la fameuse phrase de Simonide de Céos « la peinture est une poésie muette » se retourne comme un gant ! Le résultat est d’une grande fraîcheur. C’est de la peinture joyeuse, mais sérieuse, comme jadis on a qualifiait l’Art, disant que « l’art est un jeu sérieux », écrit Léon Mychkine, critique d’art, membre de l’AICA, Docteur en Philosophie, chercheur indépendant.
Suzan Shup est une artiste américaine qui vit et travaille à Paris depuis les années 80. Elle aime confronter les éléments de sa vie personnelle avec ceux de l’art, de la culture pop et de la mode, pour créer ses peintures très expressives. Souvent commencées comme des paysages, elles se terminent en grands aplats influencés par l’abstraction américaine et les color field paintings. Au début, des lignes de peinture horizontales, sorties directement du tube, annoncent l’écriture de ses futurs tableaux de la série des language paintings. Elle aime utiliser la technique du recouvrement et s’inspirer de la calligraphie asiatique, des arts navajos et de l’école affichiste française du début du siècle dernier. Elle passe fréquemment de la figuration à l’abstraction puis au langage, un savant mélange qui lui permet d’avancer dans une totale liberté. Les mots, aussi abstraits que narratifs, ont la musicalité de l’esprit DADA. Ils racontent des histoires au sujet des artistes ou se réfèrent à des évènements. Ils sont aussi là, dans une ambiance pop et douce amère pour alléger la gravité de son acte : peindre.