Dans le cadre de la Saison France-Roumanie 2019 qui vient célébrer le centenaire de la création de la Roumanie moderne et coïncide avec la Présidence roumaine du Conseil de l’Union européenne, le musée de la Chasse et de la Nature offre une carte blanche à l’artiste Mircea Cantor.
Mircea Cantor (né en 1977) artiste de renommée internationale et figure majeure de l’art contemporain roumain, étudie à l’Université d’Art et d’Esthétique de Cluj-Napoca puis à l’École Supérieure des Beaux-arts de Nantes Métropole. Il remporte le Prix de la Fondation d’entreprise Ricard en 2004 puis le prestigieux Prix Marcel Duchamp en 2011. Son enfance, passée dans un pays de régime communiste, et ses souvenirs personnels constituent le point de départ de la plupart de ses œuvres. Face au processus de globa- lisation du monde, Cantor se pose en observateur de réalités et de cultures différentes. Ses productions s’attachent à souligner les différences sociales et les frontières subsistant entre les pays. La recherche formelle et esthétique de ses vidéos et de ses installations, se combine avec un engagement poé- tique se traduisant par des gestes simples, mais d’une valeur universelle.
Pour sa « carte blanche » au musée de la Chasse et de la Nature, Mircea Cantor s’intéresse à la notion de « territoire ». Ce thème est au cœur de la rencontre du prédateur et sa proie qui inspire son récent film (“Aquila non capot muscas” 2018) où l’on voit un aigle en train de chasser un drone. Dans un autre film (“Deeparture” 2005) on assiste à la tension montante entre un loup et une biche se côtoyant dans l’espace artificiel d’un « white cube ». Mircea Cantor est également sensible à la relation très particulière que la tradition vernaculaire de son pays natal a développé avec les animaux sau- vages. La faune abondante et diversifiée (ours, loups, oiseaux migrateurs…) qui habite les vastes étendues de la Roumanie, depuis les forêts des Carpates jusqu’aux terres marécageuses du delta du Danube, inspire certaines fêtes traditionnelles et la production d’objets qui leur sont destinés. Au cours des siècles la culture chrétienne a intégré les anciens rites païens qui ressur- gissent notamment à l’occasion des colinde ou fêtes de fin d’année. Dans ces sortes de carnavals, les figures de la chèvre ou de l’ours sont invoquées pour célébrer l’an qui meurt. Particulièrement développés dans la province de Moldavie ou dans la région de Maramaureș, ces rituels se retrouvent égale- ment en Valachie ou en Transylvanie. À cette occasion, la population des villages envahit les rues, costumée en animaux ou en hommes sauvages.
Ces rites vont servir de fil conducteur à Mircea Cantor pour l’exposition qu’il organise à travers les salles du musée, comme si celui-ci devenait le territoire d’une étrange parade. En « chasseur d’images » ou « vânătorul de imagini » il collecte des objets et des œuvres et les dispose d’une manière qui leur donne un sens nouveau. Empruntant des objets d’art populaire au Musée du Paysan roumain de Bucarest, commandant à ses amis artistes de Roumanie des œuvres sur le thème de la chasse, il mélange ces « ready-made » d’un genre particulier à ses propres œuvres dans une scénographie qui vient jouer avec les collections permanentes du musée. Cette « carte blanche » culmi- nera avec la « Fête de l’ours » orchestrée par Mircea Cantor le 21 février.