Lee Ufan, Arles, Lisson Gallery. Du 29 octobre 2021 à fin septembre 2022 puis à Londres jusqu’au 22 janvier 2022.

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Lee Ufan, Arles, Lisson Gallery. Du 29 octobre 2021 à fin septembre 2022 puis à Londres jusqu’au 22 janvier 2022.

Aujourd’hui une double actualité illustre plus que jamais l’attachement de l’artiste au territoire Arlésien et son fort lien avec les acteurs locaux. Du 29 octobre 2021 à la fin septembre 2022, Lee Ufan présente l’exposition Requiem à la nécropole des Alyscamps dans le cadre des célébrations que la ville d’Arles organise cette année pour fêter les 40 ans de l’inscription de son riche patrimoine romain et roman sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Lee Ufan a composé un parcours constitué d’œuvres nouvelles, parfois inédites, spécialement pensé pour entrer en résonance avec la nécropole antique.

Cette exposition s’inscrit naturellement dans le cadre des célébrations du 40ème anniversaire de l’inscription des monuments arlésiens par l’Unesco, dans l’un des huit sites retenus, les Alyscamps que la Ville met exceptionnellement à disposition de l’artiste.

Son inauguration se fait à la même date que les célébrations organisées par la Ville, autour d’expositions, de colloques et de divers événements.

Au printemps 2022, ouvrira au cœur de l’Hôtel Vernon, hôtel particulier construit entre le XVIème et le XVIIIème siècle, situé dans les vieux quartiers d’Arles, Lee Ufan Arles espace d’exposition sur 3 étages présentant des œuvres de l’artiste et proposant également une librairie boutique et des espaces de médiation et de réception. Après ses expositions au château de Versailles en 2014 ou au Centre Pompidou Metz en 2019, Lee Ufan écrit une nouvelle page de sa relation passionnée avec la France.

 

Interview de Lee Ufan par Alfred Pacquement. 

 

Alfred Pacquement : Qu’avez-vous ressenti en découvrant ce site des Alyscamps que vous ne connaissiez pas auparavant ?

Lee Ufan : Dès l’entrée, j’ai compris que j’étais dans une nécropole en ruines.
Il se trouve que personnellement, j’aime les ruines. C’est un endroit où le passé est derrière nous. Lorsque je m’y trouve il y a quelque chose qui ne passe pas, qui reste toujours en retrait. On peut y voir l’image de ce qui est en train de disparaître.
On ne peut même pas affirmer qu’il y ait quelque chose qui se soit véritablement passé ; c’est ambigu ; est ce que c’était vraiment réel ? C’est ce genre de choses que je ressens.

 

A. P. : J’ai noté une phrase dans les textes que vous avez écrits à l’occasion
de cette exposition : « Je souhaite que ceux qui viendront aux Alyscamps rencontrent leur propre mort et la mort universelle par l’intermédiaire des œuvres que je vais produire. »
Ce qui m’a beaucoup intéressé dans cette phrase, c’est précisément cette idée que les œuvres qui, pour certaines d’entre elles sont des œuvres nouvelles,
tout au moins qui empruntent des nouveaux chemins, sont peut-être stimulées par ces lieux chargés d’histoire et de spiritualité.

L. U. : Mon travail est un dialogue permanent avec un lieu qui m’est donné. Jusqu’à présent, j’ai exposé dans des endroits divers comme des white box ou sinon en plein air. Mais cette fois-ci, c’est un site historique et en plus, c’est un endroit directement lié à la mort. Effectivement cette expérience est la première pour moi. De plus, je suis au crépuscule de ma vie. Donc il s’agit de réaliser une certaine disparition à travers mes œuvres, j’ai effectivement ici une intention tout à fait particulière.

 

A. P. : Pouvez vous évoquer cette œuvre intitulée « Soul Room » où vous souhaitez réemployer d’anciens sarcophages ?

L. U. : Il s’agit d’une œuvre avec deux sarcophages, que je vais emprunter pour le temps de l’exposition. Elle sera exposée au sous-sol, dans la profondeur de la crypte… Le sarcophage couché est vide et dans l’autre qui est dressé il y a une bougie allumée. Le sarcophage vertical peut symboliser le gardien et le protecteur des morts, comme dans certaines tombes en Corée qui représentent ces gardiens sous forme d’animaux. Au sol, je vais également produire un nuage de brouillard.

 

A. P. : Dans l’exposition à Versailles, il y avait déjà la présence d’une tombe.

L. U. : À Versailles, je voulais rendre hommage à André Le Nôtre. Plus que la mort, je voulais plutôt évoquer Le Nôtre lui-même en concevant un site pour la mort, pour une personnalité défunte. Donc l’image de la mort n’était pas si présente. C’est plutôt la présence ou l’existence de Le Nôtre que je voulais manifester à travers cette présentation de la tombe. Cette fois-ci, ce que je souhaite c’est transformer l’image de la mort abstraite en image de la mort universelle. Ce qui est, en effet, le sentiment qu’on peut avoir dans un cimetière, dans une nécropole, où on est confronté à une multitude anonyme et inconnue. Nous ne savons pas qui était là. Et pourtant, c’est bien la mort qui est présente avec un grand M.

 

A. P. : Il y a aussi cette œuvre très étonnante avec un millier de clochettes suspendues aux arbres, appelée « Requiem Path »

L. U. : En Corée et au Japon, dans les campagnes, lors de cérémonies, les chamans utilisent très souvent des clochettes. Pour rendre hommage aux morts, on plante des tiges de bambou, et on y accroche des clochettes qui sonnent dans le vent. C’est romantique, en quelque sorte. J’avais cette idée depuis longtemps. Et lorsque Christian Boltanski a réalisé une vidéo avec des clochettes accrochées à des tiges, j’y ai repensé. C’est à la fois une image de mon enfance qui surgit, mais c’est surtout l’œuvre de Boltanski qui m’a donné cette idée-là. C’est en quelque sorte un hommage à cet artiste qui était mon ami.
Je vais faire une offrande, comme une offrande aux morts, un Requiem.

 

A. P. : Votre installation aux Alyscamps a deux parties : le visiteur est accompagné dans son cheminement par des sculptures comme « Relatum, the Narrow road » ou « Requiem Path », et puis, il y a ensuite l’ensemble important qui est installé dans l’église Saint-Honorat. Il me semble que les œuvres prennent ici un tout autre sens lorsqu’elles ont déjà été présentées ailleurs, comme « Cane of Titan » par exemple.

L. U. : Vous avez entièrement raison. Mon travail diffère selon le rapport qu’il entretient avec le lieu où il est exposé. Le sens change, l’impression se modifie. Par exemple, avec « Circle and Straight » c’est un anneau que l’on traverse dans l’allée des sarcophages, lié à la disparition, au passage dans l’au-delà. Si on le mettait sur une colline ou sur la place d’une ville ce serait complètement différent.

The exhibition of new paintings continues at Lisson Gallery in London until 22 January 2022.

 

Lee Ufan 

Lisson Gallery, 27 Bell Street, London. Tell : +44 (0)20 7724 2739. www.lissongallery.com