Jenny Holzer. L’Indescriptible
- ● Dates : du 22 mars au 9 septembre
- ● Commissaires : Petra Joos, curatrice, Musée Guggenheim Bilbao
- ● Mécénat : Fondation BBVA
- – Le travail de Jenny Holzer s’articule autour de la langue. Avec ses textes crus et tranchants l’artiste aborde les éléments fondamentaux de l’existence humaine : pouvoir, violence, croyances, mémoire, amour, sexe et mort.
- – L’exposition présente plusieurs œuvres récentes, dont des panneaux électroniques robotisés, despeintures et des projections de lumière.
- – À Bilbao, les visiteurs découvriront réflexions et idées qui ont irrigué le travail de Jenny Holzer durant toute sa carrière, présentées au travers d’un large éventail d’installations expressément créées pour le Musée Guggenheim Bilbao.
- – La démarche de l’artiste vise à impliquer le public au moyen de la création d’espaces suggestifs qui invitent les spectateurs à réfléchir, voire à se définir face à des questions polémiques, telles que la crise mondiale des réfugiés, la violence faite aux femmes ou les abus systématiques de pouvoir.
- – Du 21 au 30 mars, les textes de poètes basques, espagnols et internationaux seront projetés en soirée sur la façade du Musée dans le cadre d’une série d’évènements nocturnes publics.Le Musée Guggenheim Bilbao présente Jenny Holzer. L’Indescriptible, un parcours complet du travail del’une des artistes les plus importantes de notre époque. Cette exposition, organisée grâce au soutien de la Fondation BBVA, présente plusieurs œuvres récentes, dont une série de projections de lumière sur la façade du Musée qui pourront être contemplées tous les soirs du 21 au 30 mars.L’œuvre de Holzer est présente au Musée depuis l’ouverture de celui-ci grâce à l’imposante Installation pour Bilbao (1997). La pièce —installée dans l’Atrium et commandée pour l’inauguration du bâtiment— est constituée de neuf colonnes lumineuses, de plus de douze mètres de hauteur chacune. Depuis l’annéedernière, cette installation, expressément conçue pour son actuel emplacement, est complétée par Arno Pair (2010), une paire de bancs de pierre couverts d’inscriptions donnée au Musée par l’artiste.Les réflexions et les idées, les prises de positions et les chagrins exprimées par Jenny Holzer tout au long de plus de 40 ans de carrière sont présentées au public par le biais d’une importante sélection d’installations, dont chacune est porteuse d’une forte dimension sociale. Son médium, que ce soit sur des tee-shirts, des plaques, des peintures ou des diodes électroluminescentes (LED), est le langage. La diffusion de textes dans l’espace public constitue un aspect essentiel de son œuvre, qu’il s’agisse, à sesdébuts dans les années 1970, d’affiches collées en cachette dans toute la ville de New York ou de ses récentes projections de lumière sur des paysages et des architectures.
Les visiteurs de l’exposition seront témoins de l’évolution expérimentée dans la pratique de l’artiste, qui traite de thèmes fondamentaux de l’existence humaine, comme le pouvoir, la violence, les croyances, la mémoire, l’amour, le sexe et la mort. Son art s’adresse à un public large et diversifié au moyen d’un langagedirect, concis et tranchant. Le but d’Holzer est d’impliquer le spectateur par la création d’espaces suggestifs qui provoquent une réaction, une pensée ou l’adoption d’une prise de position, laissant l’auteure, souvent anonyme, à l’arrière-plan.
Salle 205: Truismes, Essais inflammatoires et Lamentations
La série Truisms (Truismes), constituée d’une liste de plus de 250 déclarations composées d’une uniquephrase, a été créée par Holzer entre 1977 et 1979. Ces affirmations, qui évoquent les aphorismes, les maximes et les clichés existants, portent sur une large palette de propositions théoriques, philosophiques et politiques contradictoires. Disposés par ordre alphabétique, les Truismes sont d’abord apparus sur desaffiches de rue anonymes collés dans le centre de Manhattan et, depuis, ont envahis tee-shirts, casquettes, panneaux électroniques, sols de pierre et bancs. Chaque phrase réduit une idée, en principe difficile et controversée, à une affirmation apparemment simple. Les Truismes analysent la construction sociale de croyances, de coutumes et de vérités sans adopter un point de vue précis.
Comme l’affirme l’artiste, « Avec un panneau ou une affiche dans la rue, tu disposes du même laps de temps qu’une personne qui parcourt quelques mètres. Avec Truismes j’adresse un message intelligible en quelques secondes, ou sur des périodes de temps légèrement plus longues pour les personnes qui peuvent et qui veulent se concentrer. […] N’oublions pas que les spectateurs sont volontaires. […] Il y a des phrases qui sont des messages complets, que tu peux assimiler en un instant, mais si quelqu’un désire s’arrêter plus longtemps, il y a une série dans laquelle apparaissent ces phrases de trois secondes qui est un peu plus complexe […] ».
Également présents dans cette salle, les messages de la série des Inflammatory Essays (Essais inflammatoires, 1979–82) ont été, au départ, imprimés sur un papier de couleur puis, comme les Truismes, collés dans divers espaces publics de la ville de New York. Cette série reflète l’influence sur l’artiste de la lecture de manifestes politiques, artistiques, religieux ou autres. Tels qu’ils ont été imprimés en anglais, chaque texte comptait en principe cent mots disposés sur vingt lignes. À l’instar de tout manifeste, la voix de chacun de ces essais défend fermement une idéologie ou un point de vue très précis, et adopte un ton impératif. Avec cette série, Holzer invite le lecteur à réfléchir sur la nécessité d’un changement social, le potentiel de la propagande pour manipuler l’opinion publique et les conditions qui conduisent à la révolution.
À Bilbao, ces affiches se trouvent disposées dans une nouvelle configuration qui couvre tout le mur et sont assorties de traductions en basque, espagnol, français et allemand.
À l’intérieur de la salle, deux sarcophages de pierre (un en marbre rouge d’Ankara et un autre en granit noir de Nubie) présentent des fragments du texte de Holzer Laments (Lamentations, 1989). Écrit pendant la période la plus dure de l’épidémie du sida, Lamentations décrit à la première personne la mort inutile de ces locuteurs inconnus et anonymes, parmi lesquels se comptent des femmes, des hommes, des enfants et un bébé. Sur un troisième sarcophage, plus récent et réalisé en marbre de Sevarezza, est inscrit un passage du poème d’Anna Świrszczyńska “Martwa Natura” (Nature morte), chronique virulente de la brutalité de la guerre, qui atteste de la continuité des questionnements et des matériaux d’Holzer au fil des années, même si son activité s’est ouverte aux mots des autres.
De son travail sur pierre, Holzer affirme : « J’apprécie et je fais confiance à l’éphémère et à l’immatériel mais aussi à la pierre dure. Je suis arrivée à la pierre comme matériau lorsque j’ai commencé à exposer dans des galeries. Je ne voulais pas que les gens restent debout pour lire mes textes sur les panneaux électroniques. Je voulais qu’ils soient à l’aise et qu’ils prennent le temps de regarder. C’est ainsi que j’aicommencé à leur installer des bancs, puis j’ai eu l’idée d’écrire sur les sièges et que les bancs soient en pierre ».
« Quand les mots sont gravés dans la pierre, on peut les toucher, on peut les lire avec la main, et peut-être les perçoit-on différemment que quand ils sont écrits sur du papier. Le marbre et le granit figent le temps, tandis que les panneaux électroniques et les projections communiquent d’une autre façon. J’ai pensé que les rangées de bancs pouvaient évoquer chez les gens les salles d’attente, les tribunaux, les hôpitaux et les églises, que ce soit en bien ou en mal ».