Jean-Charles de Castelbajac, la Biennale en son nouvel empire !
Avec ses codes couleurs et son imagination toujours portée à la fois vers le passé et le futur, Jean-Charles de Castelbajac a inventé la scénographie de la Biennale d’aujourd’hui.
De la même génération de création que Thierry Mugler, Claude Montana, Jean Paul Gaultier ou Kenzo Takada, il est dans les années 1980 l’un de ces « jeunes créateurs » qui renouvellent la mode de l’époque, refusant le conformisme de la traditionnelle haute couture, à laquelle il finira par céder, une fois, dans les années 2000.
Tout au long de sa carrière, ayant le goût des rencontres, il sait s’entourer d’artistes contemporains qui participent à ses créations, et collabore depuis des décennies avec de nombreuses marques variées du domaine de l’habillement, de la consommation, ou du mobilier. Après un court passage auprès d’André Courrèges avec qui il est parfois comparé, il crée des vêtements liturgiques pour les Journées mondiales de la Jeunesse. Au milieu des années 2000, il est exposé au Victoria and Albert Museum ainsi qu’au Musée de la mode de Paris. Chevalier de la Légion d’honneur, Jean-Charles de Castelbajac est également commandeur des Arts et des Lettres.
Interview par Anne Kerner
Qu’avez-vous ressenti lorsque l’on vous a demandé de réaliser la scénographie de la biennale de Paris ?
J’ai ressenti beaucoup de curiosité et beaucoup d’intérêt car j’aime l’histoire et qu’elle est toujours présente dans mon coeur. J’aime les grandes scénographes qui interpellent. J’avais déjà travaillé pour les JMJ, réalisé une installation célébrant la mort d’Henri IV sur le Pont Neuf, le travail de scénographie a ponctué toute ma carrière. C’est un moyen d’amener des éléments d’histoire en voie d’oubli et de les ramener dans la modernité. C’est un défi.
Qu’elle est votre vision pour la Biennale de Paris ?
Mon intention s’est cristallisée sur la collection de Pierre Jean Challeçon qui est une collection de souvenirs extraordinaire sur l’Empire. Donc j’ai voulu faire un geste qui se propage sur toute la Biennale et qui parte du coeur de la Biennale comme un signal, comme un signe fort de modernité. Mon idée était d’envisager ce projet comme si j’avais été convoqué par l’empereur à Fontainebleau et qu’il me demande : Castelbajac, mon image est un peu vieillissante, j’ai le plus beau nom du monde, je suis face à une concurrence extraordinaire de toutes les marques de luxe,pouvez-vous repenser mon logo, ma scénographie mon image, pour que le jeunes appréhendent ma vision comme quelque chose d’ultra contemporaine. C’est celale challenge de l’histoire. C’est comment aux yeuxdes générations de demain cela pourra inspirer les carrières et les talents de demain. C’est cela le projet. Ce n’est pas de magnifier mais d’inspirer.
Comment avez-vous conçu justement ce projet ?
Je suis parti d’une idée très simple, d’abord la structure de la tente omniprésente dans l’histoire de l’empire. J’ai crée un carrousel d’étendards monumental de 26 mètres de long aux couleurs de la modernité, fortes et vives de la vie, où sont incarnés tous les êtres qui composaient le premier cercle de l’empereur. Les couleurs descendent vers le sol et se reflètent dans un carré de miroirs, qui est réceptacle de la collection de Pierre Jean Challeçon.
Ce cube de miroirs, je l’ai envisagé comme un pop up store, comme si Napoléon devenait une marque. Le nouveau logo de l’empereur sème le trouble en devenant ultra contemporain. Comment faire pour qu’aux yeux d’une jeune génération de visiteurs, Napoléon devienne désirable? Je ne cesse de travailler dans cette lutte aujourd’hui entre l’histoire, les marques de luxe et la société de consommation.
Votre geste est audacieux ?
C’est un geste très audacieux pour le Grand Palais qui a été très bien accueilli. Nous avons été toute une équipe, avec le président, le SNA, le Grand Palais pour relancer la Biennale. J’espère que d’autres suivront et qu’il interpellera. La Biennale est une énergie merveilleuse. Les antiquaires sont des explorateurs et je suis de leur côté pour leur donner les bannières de demain.
Sortie le 20 septembre sur Arté d’un moyen métrage sur l’épopée Pop de Jean Charles de Castelbajac.