Tout au long de l’année 2020, plusieurs œuvres de l’artiste Giuseppe Penone essaimeront sur le territoire de la Grande Région, nouant entre Metz et Sarrebrück des liens transfrontaliers chers au Centre Pompidou-Metz depuis sa collaboration avec le Saarlandmuseum en 2016, à l’occasion de l’exposition Entre deux horizons.
Né en 1947 dans le Piémont italien, Giuseppe Penone explore des matières, des formes et des processus inspirés par la nature. Dès la fin des années 1960, le sculpteur partage les réflexions d’artistes principalement actifs entre Turin et Rome, et rassemblés sous la bannière de l’Arte Povera par le critique d’art Germano Celant. Tous travaillent à partir de matériaux bruts, d’énergies pures, d’expériences du quotidien ou d’actes de langage. Face à l’effondrement du miracle économique italien, comme à l’essor d’une société de
consommation et d’industries culturelles, l’« art pauvre » qu’ils élaborent aspire à un dépouillement radical, à une réduction des moyens à l’essentiel, à un nomadisme hors des institutions. Une simplicité revendiquée, qui préfigure des pratiques actuelles, soucieuses de sobriété.
La forêt, la montagne, la rivière et le corps sont à l’origine de l’œuvre de Giuseppe Penone. Ses gestes favoris sont élémentaires : embrasser ou empoigner un tronc d’arbre pour en éprouver le lent processus de croissance, concentrique et ascensionnel ; retrouver les branchages enfouis dans une poutre manufacturée, en creusant un à un les anneaux de croissance du bois… Modèle vivant d’une sculpture parfaite, l’arbre s’adapte à son milieu de manière exemplaire. L’artiste le compare à un patineur et un funambule, en équilibre sur des sols instables, déjouant la gravité pour capter la lumière.
Du Château de Versailles au parc d’Inhotim au Brésil, les arbres sculptés par Giuseppe Penone ont investi les jardins les plus classiques comme les forêts les plus sauvages. Conjointement invité par le Saarlandmuseum de Sarrebrück et le Centre Pompidou-Metz, l’artiste interviendra au printemps 2020 dans l’espace public de ces deux villes, pour y implanter deux sculptures jumelles : les moulages en bronze d’arbres, supportant dans leurs branchages une pierre de rivière, dont la forme de crâne suggère l’émergence d’une pensée (Idee di Pietra, « Idées de pierres »). À Sarrebrück, l’arbre implanté à proximité du Saarlandmuseum sera environné de pierres de Jaumont, reconnaissables à leur teinte dorée typique de Metz. À Metz, l’arbre1 sera accompagné de grès rose des Vosges, propre à la région de la Sarre. Un dialogue géologique s’instaurera ainsi entre les deux villes.
Enfin, pour célébrer ses 10 ans, le Centre Pompidou-Metz invite Giuseppe Penone à investir son Forum pour une durée prolongée. L’artiste implantera dans cet espace en accès libre, largement ouvert sur l’extérieur et remarquablement haut, une installation inédite : le moulage en bronze d’un noyer haut d’une quinzaine de mètres, dont certains tronçons et ramifications seront de marbre blanc. La ramure de l’arbre et la charpente évasée du Centre Pompidou-Metz, dessinée par Shigeru Ban, entreront en résonnance, partageant une structure proche, en ombrelle maillée. Croissance du végétal, fusion de l’alliage et concrétion de la pierre : les éléments convoqués dans Indistinti confini – Noce (« Frontières indistinctes – Noyer ») forment un bois hybride tout à la fois minéral et métallique, immaculé et patiné. L’artiste voit pourtant dans ces différents matériaux le continuum d’une matière unique, prise à différents moments de fluidité et d’écoulement.