Back side/Vue de dos, Paris, Musée Bourdelle. Du 05 juillet au 17 novembre.

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Back side/Vue de dos, Paris, Musée Bourdelle. Du 05 juillet au 17 novembre.

Dans le 15è arrondissement, dans le délicieux musée Bourdelle, une sublime sélection de vêtements vus de dos révélées aux côtés d’oeuvres inédites musclées ou graciles du grand maître de la sculpture du tournant du XXè siècle ! Du grand hall des plâtres jusqu’à l’extension contemporaine de Portzamparc en passant par les ateliers d’Antoine Bourdelle, la promenade offre grâce à la scénographie de Jean-Julien Simonot, un parcours féérique avec une centaine de silhouettes et d’accessoires du XVIIIè siècle à aujourd’hui avec des mises en scènes inoubliables comme celles d’une robe de Comme des Garçons aux côtés d’un Centaure mourant ou d’une robe de Yohji Yamamoto au regard d’une femme aux bras levées…

« Après la Première Guerre mondiale, écrit Alexandre Samson, dans le catalogue de l’exposition, la vie mondaine reprend son cours : la robe du soir réapparaît et son dos se creuse. Dès l’été 1920, Vogue Paris signale « le dos audacieux de robes qui, par-devant, paraissaient des plus correctes5 » et présente une série d’articles consacrés à l’importance du dos en posant ces questions : « Cette tendance de mode peut-elle se fixer ? Les hommes ne devront-ils se rendre compte désormais de toute la grâce et de l’élégance d’une femme qu’au moment où elle s’enfuit6 ? ». La vogue des décolletés est influencée par plusieurs facteurs. L’usage et l’évolution du maillot de bain comme de la tenue de plage, l’engouement pour le bronzage permettent une nudité nouvelle du corps féminin dans l’espace public des cités balnéaires. « C’est un âge du dos, commente Vogue, et il n’existe pas de geste plus astucieux contre les coups de soleil que de faire découper chaque costume d’un décolleté dorsal identique, de sorte que chacun d’eux forme un cadre parfait pour un dos brun et lisse7. » Pour éviter les marques, le décolleté « bain de soleil » – simple bretelle passant derrière la nuque – fait son apparition en dénudant le dos et les épaules. En outre, les nouvelles danses de salon qui font alors fureur conduisent les femmes, le corps lové contre leur partenaire, à ne donner à voir que leurs dos. Les robes à danser de forme tubulaire, aux décolletés suggestifs, sont favorisées par l’idéal des Années folles d’une silhouette androgyne. La poitrine, les hanches et la taille effacées n’imposent ainsi aucune lingerie contraignante qui pourrait nuire au décolleté dorsal. Le dos nu dans les années 1920 accompagne l’émancipation du corps féminin par la conquête de sa nudité. La peau est assumée et montrée : l’ourlet des jupes remonte au-dessus des genoux et les manches des robes d’été disparaissent, détails impensables avant la Première Guerre mondiale. La vogue des décolletés est telle qu’elle séduit les femmes de tout âge. Durant cette décennie, « les corps les moins agréables comme les plus harmonieux s’exhibent de l’aisselle au creux des reins, dans l’échancrure de robes légères »… Après l’opulence des années 1920, les années 1930 opèrent un retour à l’ordre, qui se traduit, entre autres, dans la mode par un rallongement de l’ourlet à partir de 1928. Pourtant, la décennie consacre le dos nu comme une véritable signature. Elle crée même un archétype de robe appelé à une riche postérité et dont le dos est la caractéristique principale. Il s’agit d’un long fourreau du soir, souvent noir, au devant sévère, à encolure haute et manches longues, « aussi discret que possible, note Harper’s Bazaar, jusqu’à ce que l’on se retourne9 ». Le dos dévoile alors un décolleté inattendu, d’autant plus saisissant qu’il se cache sous une veste ou un manteau. Ce paradoxe entre sévérité et érotisme caractérise la décennie. L’influence du puritanisme imposé dans le cinéma américain par le code Hays est palpable. C’est en 1930 que William Hays établit un code de censure pour moraliser la production cinématographique ; celui-ci interdit notamment la nudité et l’exhibition des caractères sexuels, rendant désormais impossibles les décolletés trop suggestifs à l’écran. En réaction, le dos est filmé comme nouveau terrain d’érotisme : dans Tonight or Never (Cette nuit ou jamais, Mervyn LeRoy, 1931), Gabrielle Chanel accentue les décolletés de Gloria Swanson et, dans Bringing Up Baby (L’Impossible Monsieur Bébé, Howard Hawks, 1938), l’arrière de la jupe de Katharine Hepburn se déchire, dévoilant ses dessous »….

 

Musée Bourdelle, 18 Rue Antoine Bourdelle, 75015 Paris. Horaires : Ouvert ⋅ Ferme à 18:00. Billets : gratuit. www.bourdelle.fr