Pour sa 9e édition, les 7, 8 et 9 juin 2019, le Festival de l’histoire de l’art aura pour thème le Peuple et mettra à l’honneur les Pays nordiques.
Il réunira une centaine d’historiens de l’art (chercheurs, conservateurs, étudiants) et acteurs de la création contemporaine — dont une importante délégation d’experts danois, finlandais, islandais, norvégiens et suédois — et proposera, comme chaque année, un point de vue panoramique sur la production artistique et la discipline de l’histoire de l’art de ces pays. À travers plus de 300 événements — conférences, rencontres, tables rondes, visites, ateliers, concerts, projections et spectacles — entièrement gratuits, le Festival constitue un moment festif de partage des savoirs pour les amateurs, les familles, les chercheurs, les étudiants et le jeune public.
Le Festival de l’histoire de l’art est une opération nationale du ministère de la Culture mise en œuvre par l’Institut national d’histoire de l’art et le château de Fontainebleau. « Porte d’accès à d’autres cultures, d’autres époques, d’autres imaginaires, d’autres regards sur le monde, l’histoire de l’art est un vecteur de connaissance, d’émancipation et d’ouverture. C’est pourquoi je suis attaché à promouvoir le Festival de l’histoire de l’art auprès de tous les citoyens, dès leur plus jeune âge. » Franck Riester, ministre de la Culture
Les Pays nordiques
En 2019, le Festival accueille le Danemark, la Finlande, l’Islande, la Norvège et la Suède. À travers des conférences et des débats, des chercheurs, conservateurs et artistes des pays invités, en liaison avec leurs homologues français, feront valoir la richesse du patrimoine culturel nordique, dès avant l’époque des Vikings (Xavier Barral i Altet). Ils évoqueront tour à tour la prédominance du paysage et de la mythologie dans l’art, les questions écologiques, le rôle des musées (Susanna Pettersson, Jean-Hubert Martin, Ann-Sofi Noring), l’actualité de l’architecture et du design (Asdís Ólafsdóttir), ainsi que les traditions vernaculaires, sources d’inspiration de nombreuses œuvres. Une place importante sera donnée à l’art contemporain. Outre la conférence inaugurale prononcée par Danh Vo, seul artiste contemporain danois à avoir bénéficié d’une exposition personnelle au Guggenheim de New York, des artistes nordiques nous expliqueront comment leurs œuvres traitent de l’impact sur l’environnement des activités humaines, de la restitution des objets patrimoniaux aux communautés autochtones ou des questions identitaires (Peter Johansson).
La section cinéma du Festival proposera, pendant trois jours, une série de projections de fictions, documentaires et films expérimentaux issus de la cinématographie des Pays nordiques, allant du muet (Mauritz Stiller, Carl Dreyer…) au contemporain (Joachim Trier, Aki Kaurismäki, Lars von Trier…). Une partie du Salon du livre et de la revue d’art sera également dédiée à la présentation de l’histoire des arts et de la littérature des pays invités.
Le château de Fontainebleau accueillera exceptionnellement une exposition rassemblant les œuvres de trois artistes marqués par leur voyage au Cap Nord, aux XIXe et XXe siècles : François-Auguste Biard, Peder Balke et Anna-Eva Bergman. Brouillant les frontières de la figuration et de l’abstraction, cet ensemble d’une vingtaine de peintures et de dessins évoquera des paysages désolés où se mêlent la montagne et la mer, leurs couleurs presque étouffées par la lumière si particulière du soleil de minuit ou des aurores boréales.
Le Peuple
Après la Nature (2017) et le Rêve (2018), l’édition 2019 a pour thème le Peuple. En résonance avec les débats actuels sur la souveraineté du peuple, les intervenants interrogeront images et objets artistiques dans une perspective historique. C’est l’occasion de convier sur le sujet de nombreuses personnalités parmi lesquelles Carlo Ginzburg, Thierry de Duve ou encore Daniel Soutif. Les présentations questionneront le lien entre pouvoir et représentation, l’idée de collectivité et la pluralité de ses expressions (François Queyrel), les pratiques et cultures populaires (Cécile Pichon-Bonin) et l’organisation de l’espace social. Elles évoqueront les enjeux politiques des images lors d’épisodes révolutionnaires (Arlette Farge, Sophie Wahnich, Alain Chevalier), les regards portés sur différentes formes d’altérités (Antonella Fenech Kroke) et les utopies de l’art social. Elles analyseront aussi l’éventail des pratiques vernaculaires telles que la photographie populaire ou la fabrication des objets du quotidien.
Ces axes seront aussi abordés dans la section cinéma qui, outre une invitation exceptionnelle au grand cinéaste documentariste chinois Wang Bing, proposera plusieurs projections commentées de films liés au peuple (comme La Marseillaise de Jean Renoir) et lors des visites, ateliers, spectacles et concerts proposés tout au long du Festival. Une sélection d’objets usuels conservés par le château de Fontainebleau sera également présentée, tandis que des œuvres issues des collections de l’École nationale supérieure des mines illustreront l’histoire du peuple des mines.
La conférence inaugurale par Dan Voh.
À travers des œuvres inspirées à la fois par ses propres expériences et par des évènements historiques et politiques, Danh Võ (né en 1975 à Bà Ria, Vietnam) interroge la manière dont les valeurs culturelles, les conflits et les traumatismes résultent de constructions et d’héritages. Lorsqu’il était encore enfant, Danh Võ et sa famille ont fui le Vietnam pour venir s’installer au Danemark. L’assimilation de sa famille à la culture européenne ainsi que les évènements politiques qui ont précipité ce départ nourrissent sa pratique artistique ; son travail expose les multiples éléments entrelacés entre l’expérience intime et l’histoire collective qui façonnent notre individualité.
Par le recours à la fois à des objets ready-made historiquement chargés et à des données personnelles touchant directement ou indirectement à son propre vécu, l’artiste examine les multiples ramifications produites par l’inconstance des significations selon le contexte et la façon dont les objets eux-mêmes accumulent une charge symbolique.
Le travail de Danh Võ est à la fois énigmatique et poétique. Tout en évitant habilement de tomber dans le didactisme, il interroge les structures du pouvoir sous-jacentes de nos sociétés libérales, la fragilité des États-nations et la manière dont les objets conservent ou absorbent le désir et la tristesse sublimés des individus et de cultures entières. Conçues au sein d’un processus de travail qui allie des phases de recherche avec des rencontres fortuites et des négociations intimes délicates, les installations de Danh Võ rendent manifestes les subtilités latentes et les souvenirs enfouis dans des formes familières.
Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions tant en Asie, qu’aux États Unis. En France, le musée d’Art moderne de la Ville de Paris lui a consacré une grande exposition en 2013, tandis que le CAPC de Bordeaux l’a invité en 2018. (Texte : Galerie Chantal Crousel)