La galerie Polka présente «Cibachromes», une sélection de tirages couleur du maître japonais de la photographie de paysage Toshio Shibata. Pour cette exposition inédite et exclusive, l’artiste a, pour la première fois, décidé, en collaboration avec la galerie Polka et l’atelier Cadre en Seine Choi, d’éditer une série de tirages en Cibachrome. Ce procédé argentique couleur par destruction de pigments ou par «décoloration» a marqué l’histoire de la photographie, tant il a séduit — par sa stabilité, ses tonalités, sa densité, la constance de ses colorants, la pureté de ses blancs et la puissance de ses encres merveilleuses.
Pour Toshio Shibata ces tirages sont des illuminations intérieures. La lumière des images, spécialement choisies pour cette série unique, vient du papier lui-même. Au regard alors, l’œil se perd dans l’intensité des détails chromatiques.
Après la faillite d’Ilford, quelques laboratoires disposant encore de quelques stocks nécessaires à la conception de ces tirages très précieux ont continué de proposer leurs services aux photographes, aux galeries et aux collectionneurs. Ces stocks s’amenuisent et disparaitront bientôt. Dans le sillage du célèbre tireur Roland Dufau, l’atelier Cadre en Seine Choi à Aubervilliers, continue aujourd’hui de proposer, parcimonieusement, ce qui est en passe devenir la dernière génération au monde de Cibachromes contemporains.
Le Japon de Toshio Shibata est secret et monumental.La main de l’homme a façonné ces endroits qu’il a photographiés méticuleusement. Ils ne sont pas abandonnés. Mais silencieux et émouvants. Chez Toshio Shibata le bâti, l’architecture, l’infrastructure, le béton, le métal deviennent des êtres vivants, des objets mutant ancrés dans le paysage naturel. Le photographe lui, disparaît derrière son sujet.
Pour saisir l’essence du paysage, il efface toute forme d’empreinte sur l’espace photographié et par là même sa dépendance au sujet, dans une sorte de dialogue contraire, entre mouvement et contemplation, perception et intuition, entre sens de la vue et sens du regard. Le procédé Cibachrome magnifie ces personnages uniques et solitaires. Il devient presque possible de les approcher, de les traverser.
Les tirages de l’exposition « Cibachromes », limités et numérotés à trois exemplaires et produits en pièce unique pour les épreuves les plus iconiques, ont tous été produits pour l’occasion, en prévision de l’épuisement prochain et définitif des stocks détenus par le laboratoire Cadre en Seine Choi.
L’exposition présentée à la galerie Polka du 9 novembre 2018 au 12 janvier 2019 est une occasion unique, probablement la dernière, de venir voir les dernier témoins d’un âge photographique révolu. L’âge du triomphe de la couleur.
Cour de Venise, 12, rue Saint-Gilles, 75003 Paris
T +33 1 76 21 41 30 www.polkagalerie.com
BIOGRAPHIE : TOSHIO SHIBATA
Né au Japon en 1949, Toshio Shibata intègre le département de peinture de l’Université des Arts de Tokyo en 1968. C’est l’obtention d’une bourse du ministère belge de l’Education qui le conduit en Europe, à Gand (Belgique), au sein de l’Académie Royale des Beaux-arts où vient tout juste d’être inauguré un département dédié à la photographie. Il y restera plusieurs années, pro tant de ses études pour voyager à travers la Belgique et la France mais aussi l’Espagne ou encore la Norvège.
A l’occasion d’une visite à Paris en 1974 il découvre la galerie Zabriskie. L’exposition «The American West:One hundred years of landscape photography» où sont notamment présentés les travaux de Minor White et du groupe f/64 dont font partie Edward Weston et Ansel Adams est pour lui une révélation. «C’est la première fois que je voyais ces images ailleurs que dans les livres. Je me disais : ‘‘Mais comment sont- ils capables de faire d’aussi beaux tirages?‘‘ Tous ces maîtres du paysage ont été pour moi une vraie source d’inspiration. »
De retour au Japon, Toshi Shibata réalise en 1983 sa première série, « Quintessence of Japan », à la recherche, dans la nature, d’infrastructures étranges et de traces humaines enracinées dans le paysage. En 1992, il reçoit le 17e Kimura Ihei Photography Award. Son travail est publié dans un premier livre aux éditions Ashahi Shim- bun, «Photographs by Toshio Shibata».
En 1995, il se voit confier par le Museum of Contemporary Art de Chicago le projet de photographier les Etats-Unis. Il réalisera à cette occasion des vues en plongée du barrage de Grand Coulée dans l’Etat de Washington.
Après des années passées à travailler en noir & blanc — il a précieusement conservé les épreuves vintages dans son atelier tokyoïte — Toshio Shibata se consacre depuis le début des années 2000, exclusivement à la couleur. En 2009, le Tokyo Metropolitan Museum of Photography a consacré une vaste rétrospective à l’ensemble de son œuvre. Dernièrement, ses travaux ont également fait partie intégrante de l’exposition« Japanese Prints and Photographs: Paths through Modernity »organisée par le LACMA.
Les travaux de Toshio Shibata font partie des collections publiques des Musées Royaux des Beaux-arts de Bruxelles, du Museum für Kunst und Gewerbe de Hambourg, du Center for Creative Photography de l’Université d’Arizona de Tucson, de l’International Museum of Photography de la George Eastman House de Rochester, du Los Angeles County Museum of Art, du Museum of Fine Arts de Houston, du MoMA de New York, du Tokyo Metropolitan Museum of Photography et de la Bibliothèque Nationale de Paris.